NOTES

 

Ces deux paragraphes enregistrent, réduite à ses conclusions beaucoup simplifiées et avec quelques libertés prises, la longue discussion des titres des trilogies et des tétralogies attribuées à Eschyle conduite par A. Pierron (ouvragre cité, p. XIVI-XLVIII):

« Nous ne savons pas combien Eschyle avait composé de trilogies proprement dites; mais il n'est pas téméraire d'avancer que la moitié environ de ses pièces formaient des groupes du genre de l'Orestie. Il y a des trilogies dont nous avons les titres généraux; il y en a dont l'existence n'est que probable; il y en a enfin qui sont plus ou moins conjecturales. Le Prométhée enchaîné, d'après l'opinion de la plupart des critiques, était la seconde pièce d'une trilogie, dont la première pièce était intitulée Prométhée porteur du feu, et la troisième, Prométhée délivré. Les Sept contre Thèbes faisaient également partie d'une trilogie. On le conjecturait jadis; c'est un point hors de doute aujourd'hui. Une didascalie, récemment découverte, nous apprend qu'on avait représenté les Sept contre Thèbes après deux autres tragédies intitulées, l'une Laïus, et l'autre, OEdipe; mais on ignore si la trilogie avait un titre général. La légende des Labdacides semble avoir fourni au génie d'Eschyle le sujet de plusieurs autres tragédies; mais les titres de ces tragédies n'indiquent pas clairement s'il y avait une autre trilogie que celle dont faisaient partie les Sept contre Thèbes. Les Suppliantes étaient la seconde pièce d'une trilogie intitulée la Danaïde, dont la première pièce se nommait les Égyptiens, et la troisième, les Danaïdes. Ainsi, sans sortir des pièces que nous possédons, voilà déjà trois ou peut-être même quatre trilogies: la Danaïde, l'Orestie, la trilogie ou les trilogies thébaines.

La légende de Bacchus avait été largement exploitée par Eschyle, comme par les premiers poètes tragiques. Il est certain qu'Eschyle en avait tiré une trilogie intitulée la Lycurgie. Les titres particuliers des trois tragédies étaient: les Édons, les Bassarides, les Jeunes Hommes. On conjecture que trois autres tragédies, empruntées à la même légende, Sémélé ou les Hydrophores, Penthée ou les Bacchantes, et les Cardeuses de laine, formaient également une trilogie, et même que cette trilogie se nommait Penthée, je dirais plutôt la Penthéide.

Quelques-uns croient, mais sans beaucoup de fondement, que la Niobé du poète était, comme les Sept, comme les Suppliantes, une portion de trilogie. Rien ne prouve que les deux tragédies qu'on rattache à celle-là, savoir les Nourrices et les Gens du cortège, aient eu le moindre rapport avec la légende de Niobé. La trilogie intitulée Athamas se composait, selon les critiques, des trois tragédies suivantes: les Faiseurs de filets ou les Tireurs de filets, Athamas, les Théores ou les Isthmiastes. On réunit, sous le titre de Perséide, trois pièces qui embrassaient, à ce qu'on suppose, les principaux faits de la légende de Persée: Danaé, les Phorcydes, Polydecte. La tragédie intitulée Etna était, dit-on, la troisième pièce d'une trilogie intitulée elle-même Etna, ou les Femmes etnéennes; les deux autres pièces étaient Alcmène et les Héraclides, et la légende des Paliques se rattachait par quelque point à la légende d'Hercule. Il est douteux que l'Iphigénie d'Eschyle doive compter, comme le veulent certains critiques, pour la première, ou la seconde, ou la troisième pièce d'une trilogie, dont les deux autres pièces auraient été les Faiseuses de lit et les Prêtresses. Non seulement on ignore comment les trois pièces se suivaient, mais on ne sait pas même ce qu'étaient ni ces Prêtresses, ni ces Faiseuses de lit, ni comment de pareils titres peuvent avoir eu rapport à l'histoire de la fille d'Agamemnon. Quelques-uns donnent le nom d'Iliade tragique à une trilogie dont Achille était le héros, et dont l'existence est incontestable. Les trois tragédies portaient les titres suivants: les Myrmidons, les Néréides, les Phrygiens. On suppose que la tragédie intitulée Psychostasie, c'est-à-dire la Pesée des âmes, faisait partie d'une trilogie, et que cette trilogie portait le nom d'Éthiopide. Mais ce n'est là qu'une simple conjecture: c'est à peine s'il est prouvé qu'Eschyle avait fait une tragédie de Memnon; et la troisième pièce de la prétendue trilogie sur le fils de l'Aurore n'est pas même connue. Il est possible qu'un lien dramatique ait uni entre elles les trois tragédies dont Ajax et Teucer étaient les héros, et qu'on range dans cet ordre: le Jugement des armes, les Femmes thraces, les Salaminiennes.

Les drames satyriques étaient quelquefois tirés de la même légende que la trilogie, et certains groupes dramatiques d'Eschyle étaient des tétralogies, dans le sens le plus strict du terme. Telle était la tétralogie dont l'Orestie était la principale portion: Protée, le drame satyrique qui suivait l'Orestie, était emprunté, comme tout le reste, à la légende des Atrides. Telle était la tétralogie dont faisaient partie les Sept contre Thèbes; seulement le Sphinx, qui suivait la trilogie, faisait rétrograder l'action jusqu'au temps de la première ou de la seconde tragédie. Telle était la tétralogie terminée par le drame satyrique intitulé Lycurgue: la Lycurgie se prenait tantôt pour la trilogie tragique, tantôt pour la tétralogie entière. Il y avait probablement d'autres tétralogies dans le même cas que la Lycurgie, que la tétralogie thébaine, que la tétralogie sur les Atrides. »